Cette thérapie génique pourrait calmer les neurones hyperactifs qui causent les crises d’épilepsie : ScienceAlert

Quelque 50 millions de personnes dans le monde souffrent d’épilepsie. Alors que la majorité de ces personnes sont capables d’utiliser des médicaments pour gérer et prévenir leurs crises, environ un tiers ne répondent pas bien à ces traitements.

Dans de tels cas, la seule option disponible pour maîtriser les crises consiste à retirer la partie du cerveau où surviennent les crises. Mais cette procédure est extrêmement risquée.

Étant donné que les crises d’épilepsie sont causées par une activité excessive des cellules cérébrales (neurones) dans des parties spécifiques du cerveau, le fait de pouvoir cibler ces neurones et de les désactiver pourrait très bien empêcher les crises de se produire.

Grâce à une nouvelle approche innovante de thérapie génique que nous avons développée, nous avons pu montrer dans des modèles cellulaires et animaux qu’il est possible de cibler spécifiquement les neurones responsables des crises d’épilepsie.

Cela les a ensuite empêchés de devenir hyperactifs et de provoquer des crises à l’avenir.

Cette découverte a non seulement des implications majeures pour le traitement de l’épilepsie résistante aux médicaments, mais il est également possible qu’elle soit utilisée pour traiter d’autres affections neurologiques causées par des neurones hyperactifs, notamment la maladie de Parkinson et les migraines.

Thérapie génique

La thérapie génique fonctionne en modifiant directement les gènes d’une personne afin de traiter une maladie ou un état. Il existe différentes manières de procéder.

Des études antérieures qui ont utilisé la thérapie génique pour traiter l’épilepsie dans des modèles animaux l’ont fait en utilisant un virus qui a été modifié en laboratoire afin qu’il ne soit plus nocif. Les chercheurs injecteraient le virus dans la région du cerveau où se produisent les crises.

Le virus implanterait alors des tronçons d’ADN dans les cellules, modulant efficacement leur fonctionnement, les rendant moins actives et prévenant les crises.

Bien que cette technique soit beaucoup moins invasive que la chirurgie cérébrale, le problème avec la méthode est qu’elle affecte tous les neurones de la région du cerveau – pas seulement ceux qui causent les crises.

Il modifie également de façon permanente les propriétés des cellules qui absorbent l’ADN délivré par le virus, ce qui peut modifier de façon permanente la fonction cérébrale.

Mais notre nouvel outil de thérapie génique innovant a montré qu’il est possible de modifier uniquement les cellules cérébrales qui provoquent des crises, sans affecter les neurones sains à proximité. Nous avons pu le faire en tirant parti de la façon dont l’expression des gènes est normalement régulée.

Le rôle des promoteurs

Les quelque 20 000 gènes que nous avons dans notre corps contiennent chacun des instructions pour fabriquer différentes protéines et molécules. Ces gènes sont généralement sous le contrôle de segments d’ADN voisins, appelés promoteurs. Ceux-ci déterminent si et combien d’une protéine particulière est fabriquée. Différentes cellules expriment différentes protéines selon les promoteurs actifs ou inactifs.

Il existe également un type spécial de promoteurs (appelés promoteurs “dépendants de l’activité”) qui ne s’activeront qu’en réponse aux signaux biochimiques émis par les neurones lorsqu’ils se déclenchent intensément, comme lors d’une crise.

Nous avons profité de ces promoteurs dépendants de l’activité pour créer une thérapie génique qui détecte et diminue l’excitabilité des neurones qui provoquent des crises. Nous l’avons fait en couplant des promoteurs dépendants de l’activité à des séquences d’ADN qui contiennent des protéines qui calment les neurones.

Nous avons d’abord testé l’outil de thérapie génique sur des neurones cultivés dans une boîte, puis sur des souris atteintes d’épilepsie résistante aux médicaments. Nous avons également testé cette technique dans des “mini-cerveaux” humains cultivés en laboratoire.

Dans chaque test, nous avons pu montrer que cette nouvelle technique de thérapie génique était efficace pour calmer les neurones hyperactifs impliqués dans les crises tout en laissant les cellules saines témoins intactes.

Bien qu’il faille environ une heure pour s’activer – plus que la durée habituelle d’une crise – la nouvelle thérapie génique est très efficace pour prévenir les crises ultérieures.

Pour ce faire, il sélectionne automatiquement les neurones à traiter et les éteint. Il est également capable de ramener les neurones à leur état d’origine lorsque l’activité cérébrale revient à la normale. Si les crises se reproduisent, le promoteur est prêt à s’allumer.

Le traitement ne doit donc être administré qu’une seule fois, mais a un effet durable, éventuellement à vie.

Surtout, le traitement n’a pas affecté les performances des souris dans les tests de mémoire et d’autres comportements normaux (tels que leurs niveaux d’anxiété, d’apprentissage et de mobilité).

Nous sommes enthousiasmés par cette percée car elle pourrait en principe offrir la perspective de la thérapie génique à un large éventail de personnes atteintes d’épilepsie résistante aux médicaments. Mais avant que la thérapie ne soit prête à être utilisée avec ces patients, nous devrons la soumettre à un certain nombre de tests pour vérifier qu’elle peut être étendue à des cerveaux plus gros.

Gabriele Lignani, professeur associé, épilepsie clinique et expérimentale, UCL et Dimitri Kullmann, professeur de neurologie, UCL

Cet article est republié de The Conversation sous une licence Creative Commons. Lire l’article d’origine.

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